Photo du jour le 7 septembre 2012

Dans ce atmosphère de fin d’été, je regarde mes enfants jouer au loin sur la passerelle, je me sens étonnamment calme, je n’ai plus peur pour eux, il y a quelque temps je n’aurais pas supporté qu’ils soient si loin, qu’ils jouent en hauteur, qu’ils ne m’écoutent pas, je leur en aurait voulu pour cette insouciance, cette joie d’être au monde, ces rires sans raison, ma seule obsession aurait été de le protéger de tous les dangers, j’aurais envisagé les pires scénarios et même j’aurais inventé des risques potentiels, l’essentiel aurait été qu’il soit tout prêt de moi et le plus calme possible sans être inactifs afin de neutraliser mes pensées les plus sombres, maintenant qu’il pleut des étoiles dans ma tête, je souris et je me sens heureuse de les voir vivre, je somnole dans l’herbe sans inquiétude car nous sommes plusieurs à les surveiller du coin de l’oeil, la journée s’est passée en douceur autour de cette ballade et du pique-nique, tout à l’heure quand je serais moins fatiguée j’irais les rejoindre pour m’amuser avec eux et les prendre dans mes bras, on regardera ensemble le Soleil se coucher et disparaître.

photo du jour de @jn sur instagram le 7 septembre 2012

sur mes mots en miette

Il pleut des étoiles
Sur mes mots en miette
Quand nos bouches se rencontrent
et le goût du vide nous affole.

(journal des mots n°124 / 24 septembre 2012)

Taxidermie

Collage sur enveloppe avec tableaux et animaux

Ces vacances en Bretagne ont été un vrai bonheur. Quand nous n’étions pas à la plage, nous jouions dans la campagne ou dans l’immense par de la maison de Yannick. J’adorais la cabane au bord de la mer avec ses volets bleus. J’aurais préféré y dormir plutôt que dans le château à l’ambiance froide et étrange. Tous les murs étaient couverts de tableaux, de trophées d’animaux ou de livres. Aucun espace pour respirer. Les meubles étaient vieux. Ils ressemblent à ce que l’on voit dans les musées quand on y va avec l’école. C’est dire. La nuit, je fais des cauchemars où je vois des animaux empaillés se promenant dans les couloirs. Et puis, il y a la sœur de Yannick, pâle et habillée de blanc. Elle ne sort jamais.

(d’après une création postale d’Isartpostal)

quelques mots de souffrance

Autour d’une tasse de thé
quelques mots de souffrance
libère la flèche des possibles
entendre résonner demain.

(journal des mots n°123 / 22 septembre 2012)

Art postal: qui êtes-vous?

collage textes et visage sur le thème du japon

Il y a le choc de la catastrophe. Tout est démoli. Je me réveille et j’erre dans les ruines du raz de marée. Le plus effrayant est d’être seule. Personne à qui parler. Dans les décombres, je vois les restes d’un téléphone. J’aimerais avoir quelqu’un à rassurer, un ami à appeler, un patron à prévenir. En même temps, cette solitude me rend plus légère face à la destruction du monde qui m’entoure. Je n’ai plus aucun repère face à ce paysage bouleversé. Une joie étrange m’envahit et je marche avec une intensité accrue dans mon regard. J’attends le changement. Après plusieurs heures d’errance dans un état de fatigue extrême, je rencontre un homme qui me demande : « Qui êtes-vous ? ». Je réponds : « Votre prochain amour. »

(création d’Isartpostal)

Des murs qui parlent

Murs avec texte, papier peint et objets

C’est ici que le poète pesait les âmes de ses compagnons d’enfermement. Sa cellule était couverte de textes, du délire au poème en passant par les recettes de cuisine. Au détour de ce palimpseste infini, on pouvait lire – paraît-il, car les autorités ont fait repeindre la cellule à la hâte –le nom des compagnons exécutés ou « disparus ». Les morceaux joués par l’orchestre de la prison figuraient aussi, toujours du classique. Le poète écrivait tard dans la nuit, même quand la lumière avait été éteinte. Et puis, quand le grattement du poète contre le mur s’est arrêté, ils ont su que la catastrophe était proche. Tout le monde a été libéré et ils se sont retrouvés dehors, perdus, face à un monde incompréhensible. Ils n’avaient plus de mémoire. Sans le poète, ils ne savaient plus qui ils étaient. Ils avaient perdu le sourire. Les compagnons d’infortune du poète eurent beaucoup de mal à se disperser et bien plus tard ils sont venus tous les ans visiter la prison-musée.

Photo du jour le 1er novembre: trop parfait

Visage de mannequin dans une vitrine

Trop parfait, ce visage dans la vitrine, trop parfait, si beau de loin, si attirant, ce regard étrange, glacial mais mélancolique, comme cherchant de la compagnie, de loin, si beau, je devine une élégance tout en sobriété caché par la vitrine, je me sens intrigué, attiré, aimanté, et pourtant angoissé, trop parfait, si beau de loin, comme figé dans une tristesse inconsolable mais fier, la beauté plastique des mannequins sans la frime que je sens souvent dans leur fausse nonchalance, je lui souris et je m’approche, il ne m’a pas vu, si beau, si absent, il reste immobile et glacial, comme loin de moi, de nous, du monde, la ville tente désespérément de s’imprimer en lui mais rien n’y fait, ce regard étrange, il est absent, il est indifférent, ce crâne rasé le rend encore plus touchant, maladie ou volonté d’imposer son visage brut et fort, si parfait que j’ai peur de me brûler si je viens plus près, alors je prends cette photo de loin pour garder quelques temps une trace de cette beauté inconsolable.

laisse s’échouer les mots tendres

La feuille tombée dans un rouleau d’écume
laisse s’échouer les mots tendres
qui voudraient bien s’effacer
si le poète avait un moment d’inattention.

(journal des mots n°121 / 13 septembre 2012)