les mots de la révolte fusent

A force d’être tus
A force d’être inaudibles
les mots de la révolte fusent
feux d’artifices potentiellement mortels.

(journal des mots n°71 / 23 avril 2012)

Vases communicants: Chanel à Bruxelles and co

Vase communicant avec La pelle est au tractopelle ce qu’est la camomille à Camille

Vases communiquants

Chanel à Bruxelles and co

Coco Chanel, sortie du métro porte de Hal, s’étonne de la pelouse pelée.
Coco Chanel écoute le guide chanter la gloire de cobra et se surprend à apprécier malgré elle le graf de celui-ci, tracé d’une ligne épurée.
Coco Chanel trouve que c’est bien vu d’écrire le F de freedom dans un cercle et note l’idée, elle la replacera bien un jour.
Coco Chanel se demande se qu’elle fait dans cette ville de province où les immeubles ne sont pas alignés, ni leurs fondations d’équerre, ni les rues rectilignes. Que du guingois.
– En plus ce n’est pas une ville de province, c’est une capitale.
Coco Chanel aperçoit une petite danseuse chinoise en tutu qui tague en entrechat sans regarder ce qu’elle fait et se demande si c’est ça le talent.
Coco Chanel écoute le guide expliquer le graf qu’il a fait pour son amoureuse sur une baraque à frite et se demande si l’amour est raisonnable.
Coco accroche ses yeux au mur, une Longue Chenille de mots qui attendent, mais quoi…
Coco Chanel frémit, des invaders ont envahi la rue, enfin au moins un, alors qu’on est déjà en 2012.

Coco Chanel trouve les pavés disjoints dangereux pour les talons, gare aux tendinites.
Coco Chanel s’exaspère de l’embrouillamini de graffitis et juge Diogène carrément surévalué.
Coco Chanel ne comprend pas cet urbanisme de broc ou des immeubles sont implantés en biais.
Coco Chanel trouve que les passants sont vêtus de loques, ou dans le meilleur des cas de frusques qui jurent entre elles.
Coco Chanel regrette de ne pas avoir été dignement présentée aux vingt agents de la mairie qui traquent les graffers, les tagueurs ainsi que les street-artistes 365 jours sur 365.
Coco Chanel trouve complètement illégitime, voir révoltant, que l’on porte atteinte aux murs privés avec des dessins dignes d’enfants de deux ans.
Elle rêve de laque de signes, elle guette les hautes lettres colériques, l’envol n’est pas loin.
Coco Chanel t’en ficherait du chic, partout, du chic dans ces rues biscornues, ces trottoirs troués et le monde ne s’en porterait pas plus moche.seqd
Coco Chanel va avoir ses vapeurs si elle reste plus longtemps dans un endroit fichu comme l’as de pique et hallucine des formes épurées.
Coco Chanel se demande où vont ceux qui partent et se dit qu’ y en a qu’ont bien de la chance.
Coco se détourne des fesses rebondies où se trouve tatoué le premier article de la vingt cinquième constitution belge.
Coco Chanel abhorre la pluie et songe qu’il faudrait couper net la tête aux conducteurs de tram en grève, elle est dans ses petites ballerines à Bruxelles.
Coco Chanel se sent désespérément seule et incomprise dans cette ville de province, pas digne d’être l’écrin de son talent étincelant, même si cette ville est, parait-il, une capitale.
Coco vole une bombe et trace d’un trait bleu et d’une main véloce, ni dieu, ni jean-paul 2.

les mots furieux

Dans l’effervescence de l’orage
les mots furieux
sont les tourbillons
de nos vies suspendues

(journal des mots n°69 / 19 avril 2012)

les horizons perdus

il suffirait d’un pas
pour marcher dans le ciel
celui des horizons perdus
où savoir parler d’amour
aux nuages qui passent
et nous ignorent
n’est pas un rêve.

d’après le photoblog My Rainy Days , inspiré par la photo In the sky

les mots intimes

Apprécier la chaleur
les mots intimes
caresses si profondes
que le corps s’en réjouit.

(journal n°68 / 18 avril 2012)

Ce n’était pas ma destination

Ce n’était pas ma destination, toute la nuit avait été absurde, une errance idiote, pire qu’un rêve angoissant, je cherchais d’autres mots pour fuir ces phrases lancinantes qui m’obsédaient, presque sans fin, sauf lorsque les étoiles filantes faisaient leurs apparitions, alors je courais le plus vite possible, ce n’était pas ma destination, je marchais dans Montréal dans le noir sans avoir l’impression que cela puisse finir, c’était pourtant comme rêver en plein jour, les personnes et les objets se diffractaient à une allure fantastique, allant même jusqu’à se mélanger dans une sarabande menaçante, pire que l’angoisse de mourir, au-delà des peurs enfantines qui m’assaillaient chaque fois que j’apercevais au loin un chat noir au pas décidé, ce n’était pas ma destination, mes pas m’amenaient pourtant bien vers cet immeuble, je ne faisais que repousser de plus en plus fort l’approche finale, les détours n’y faisaient plus rien, je savais que ma maison était définitivement là.
3/3
d’après le journal de Montréal, inspiré de la photo Ref:275617

les mots se sont défaits

D’un souffle à l’autre
les mots se sont défaits
et la folie scintille
ne pas rentrer dans son château

(journal des mots n°66 / 15 avril 2012)

ne pas suivre les étoiles filantes

maman me disait toujours de ne pas suivre les étoiles filantes, c’est juste une lumière lointaine et disparue depuis longtemps mais qui nous fait rêver, mais c’est plus fort que moi, je guette les moindres signes et je me précipite pour contempler, pour rêver et pour m’oublier, ces petites pauses dans mes tourments de mots sont délicieusement bizarres, le souffle d’une image apaisante, immobile et belle face de tout ce qui m’assaille, quotidiennement, le noir ne m’a jamais fait peur, au contraire j’aimerais m’y plonger et y disparaître, me fondre dans ce vide attirant, pour se prendre en pleine figure, juste avant l’aube, un réveil destructeur, la méchanceté même qui explose et qui disperse la paix nocturne, et de regretter, si j’avais pu suivre les étoiles filantes tout aurait été différent
2/3

inspiré de la série Journal de Montréal, d’après la photo Ref:267532