Photo du jour le 6 avril 2012

Comme une longue fête de famille, les retrouvailles ont été euphoriques, les embrassades et les nouvelles fusaient dans tous les sens, nous étions ivres de nous retrouver, les enfants sont partis tout de suite jouer sur la plage, leur excitation était belle à voir, l’apéritif fut moins frénétique, nous continuons à égrainer les petits faits du quotidien depuis la dernière fois, là des travaux dans la maison, ici le voyage en Grèce, ailleurs un nouveau boulot, puis les enfants fatigués ont commencé à nous agacé et le repas n’était pas encore chaud, quelques petites piques sont arrivées, la ritournelle connue des reproches, le vin coulait à flot et les esprits s’échauffaient un peu, les grands parents avaient beau calmer le jeu ou tenter de détourner l’attention, rien n’y fit, quelques belles vacheries étaient en préparation quand un enfant a fait une grosse bêtise qui a focalisé l’attention de tous les adultes contre lui, le bouc émissaire ayant été sacrifié, le calme est revenu autour du café et puis on a dansé, l’assemblée s’est dispersée au rythme des vagues, la musique s’est faite plus calme et plus discrète jusqu’au levée du soleil, les survivants sont allés en silence au bord de la mer pour admirer le retour de la lumière.

d’après une photo de @chloecyde, photo du jour le 6 avril 2012 sur Webstagram

Feu follet

Dans la ouate, sa voix est une flamme
les cordes hypnotiques fuient toute stridence
ne pas tourner en rond
sinon la transe ne vient pas
je me suis perdu dans les basses
à bout de souffle
le feu follet m’a finalement attrapé
dans le creux de son épaule

d’après le morceau You’ve Got Me (Nhar Firefly Remix) de Lee Burton

les mots fissurés

La voix souffle délicatement
Les mots fissurés
qui dissimulent
la fragilité de la ville.

(journal des mots n°58 / 2 avril 2012, pendant la lecture de P.Ménard à la Médiathèque de Guebwiller)

la règle du jeu / Daniel Bourion

Vase communicant: Face Ecran

Vases communiquants

La règle du jeu ne variait pas : on tirait au sort tous les mois dans les listes électorales un inconnu ensuite enlevé un matin par les troupes spécialement entraînées pour cela et dont le travail propre net et sans bavures était depuis longtemps reconnu. Une fois le candidat involontaire endormi, sa mémoire était soigneusement lavée de tout souvenir par des méthodes gardées secrètes puis on le déposait dans le centre commercial totalement vidé et truffé de caméras invisibles. Enfermé là, l’individu s’éveillait seul.

C’est le moment où les paris en ligne affluaient, chaque spectateur misant sur des possibles plus ou moins probables (personne ne doutait plus que l’individu se servirait quelque chose à boire et partirait sans payer, ou passerait de longues premières minutes à hurler dans l’espoir vain d’une réponse).

Les gains les plus importants se faisaient évidemment sur le plus spectaculaire, crise de démence, sanglots, fissure de l’être et parfois même, ces jours où toutes les audiences explosaient, suicide en direct.

On ne savait pas ce que devenait les candidats une fois les projecteurs éteints. Aucun n’était jamais rentré chez lui, mais leurs familles éventuelles ne cherchaient pas plus loin : les compensations versées par les multinationales télévisuelles consolaient assurément de tout.

Photo du 31 mars 2012

J’aime ces longs moments de réflexion, je m’allonge et je laisse divaguer mes pensées, je revois toute ma journée, parfois je focalise sur un détail, je réfléchis à certains mots entendus ou à une phrase lue, j’imagine les moments qu’on va partager ensemble, forcément trop court, quand je pense à ma vie je la vois en gris ou au mieux dans un sépia brillant mais jamais en couleur, ces petits boulots de rien qui ne durent jamais, ces amis distants qui ne comprennent plus ce que je suis devenue, notre amour discontinu qui ne mène de toute façon nulle part, le temps qui refuse de me sourire, qui refuse de me faire un clin d’oeil, même un  tout petit, qui refuse de passer tout simplement, je me sens capturée dans une éternité douce amère, il y a combien de temps que je n’ai pas ri?

d’après une photo de @yupik, photo du jour le 31 mars 2012 sur Webstagram

Litanies à bout de souffle

J’aime respirer les sons
mon air est envahit de litanies
ces lancinants murmures inconnus
ma voix se retient de les suivre
ne pas déformer la beauté
des basses à bout de souffle.

d’après le morceau Boyman de Lee Burton

mots piments

Avoir sur le bout de la langue
des mots piments
ceux-là même qui affolent la phrase
d’un goût de folie.

(journal des mots n°55 / 28 mars 2012)