Feuille morte

J’ai perdu la tête. J’ai fui, j’ai marché, j’ai couru, j’ai frappé sur les arbres, je me suis perdu dans cette forêt. J’ai crié doucement en moi en regardant tomber cette feuille morte. Je ne veux pas vieillir. Je ne veux pas être seul. Je ne veux pas devenir fou. Et pourtant mes pensées s’échappent et flétrissent comme ces feuilles mortes. Et pourtant les mots s’emmêlent dans ma bouche et à force de chercher à les rassembler, j’en perds tout mon souffle. J’ai peur et je voudrais être plus que le reflet de moi-même. Aurais-je droit à un printemps comme ces arbres qui m’entourent et me protègent?

d’après le photoblog de Luc Lombarda , inspiré de la photo Feuille morte – Arboretum de la vallée aux Loups

l’effervescence des mots

Dans le coeur des flocons
se cache l’effervescence des mots
que le poète capte parfois
avec son regard délicat

(journal des mots n°16, 30 janvier 2012)

Photo du 3 février 2012

je l’ai attendu, elle a fini par arriver cette satanée neige, ces derniers temps le ciel était lourd de belles promesses mais rien n’y faisait, les nuages s’éloignaient et je redevenais triste, irritable, j’avais pris ma décision à l’automne de venir m’installer définitivement à la montagne, je voulais en finir avec la ville et ses passages incessants du désir, j’ai tout liquidé y compris ma solitude, je me sentais léger dans ce chalet, au début j’étais joyeux et l’attente ne comptait pour rien, tout était réglé dans ma tête, je me délectais du paysage, je me fatiguais avec de longues randonnées, je dormais tout mon saoul, je m’enivrais du vent et du froid, je vivais avec une rare intensité, la neige et la fin de l’histoire n’allaient plus tarder, et puis l’hiver a été particulièrement clément et l’attente devenait étouffante, je n’en pouvais plus, moi qui avait prévu de mourir avant Noël, tous mes plans étaient chamboulés, insomnie et aboulie m’ont gagné, j’ai dû faire bonne figure lors du passage des gardes forestiers, après leur passage tout me fatiguait, je ne voulais plus sortir, je mangeais à peine, je cassais et sciais sans cesse des bûches, je tournais en rond et je détestais ces nuages qui ne faisaient que traverser mon horizon, jusqu’à hier… maintenant la paix blanche est venue, je suis heureux, j’admire la mer de lumière devant mes yeux, je fais durer encore un tout petit peu et je vais sortir pour une ultime danse.

d’après la photo du jour 3 février 2012 de @serdar_g sur Webstagram

ballade inachevée

Après une nuit hagarde à regarder les tourbillons noirs dans le ciel de Paris, je sortais dans la rue. J’espérais retrouver tous mes sens en respirant la foule et en marchant au hasard. Les oiseaux et les feuilles d’arbre  planaient de façon menaçante. Mon cerveau cherchait de l’air. Les touristes et leurs trajectoires idiotes me donnaient envie de rire jaune. J’ai acheté une gaufre et j’ai repensé à mon enfance si heureuse. Je chantais tout le temps. On ne m’obligeait à rien. Aujourd’hui… Je marche en zigzaguant vers une sculpture dansante, ces inengendrés qui tentent de se faire comprendre du ciel sombre. Je continue à marcher au hasard. Je fuis l’Echappée qui voudrait nous absorber. Je continue à marcher au hasard. Je m’arrête trop longtemps devant cet arbre blanc inaccessible mais si beau. Je voudrais continuer à marcher au hasard mais je reste immobile, sans attente, sans peur, sans désir.

d’après le photoblog de Luc Lombarda, inspiré de la photo Ballade à Paris du 24/10/2010