comme une âme chiffonnée

ce matin des fleurs de mots ont éclos du papier, j’étais jusque là à peine plus qu’un reflet, j’avais la fâcheuse impression d’être égarée dans le monde, comme un âme chiffonnée qui attendait le rebut, je m’étais réveillée plus par habitude que par envie de vivre, j’avais bien remarqué dehors quelques belles et inattendues couleurs mais je l’avais attribué à mon état de demi-sommeil, je m’étais évadée quelques minutes dans un des nombreux livres commencés mais jamais finis qui traînait dans mon appartement et le carillon léger de la boite aux lettres m’avais sorti de mon état d’abandon dans les mots, et puis soudain cet envoi postal rayonnant d’amour par sa profusion de chatoyante, puis soudain ces fleurs jaillissant de l’enveloppe, puis soudain ces mots d’une tendresse joyeuse, ont fait s’évaporer dans un déclic toutes les inquiétudes agrippées à mon coeur.

d’après le blog Wingsofflo, inspiré du billet … déjà, il avait sonné si fort qu’elle en était…

une lassitude des mots

Sous le poids des livres, il me vient
une lassitude des mots
qui ne cherchent pas
à tout nous dire

(journal des mots n°40 / 5 mars 2012)

sublimes lambeaux de peaux

Dans l’écho flou de mon visage
mes obsessions s’enfuient dans la musique
ma voix danse sur les montagnes russes
les émotions qui s’effondrent
des feuilles mortes à l’abandon
la lumière se détache
des lambeaux de peaux invisibles
le sublime se cache parfois
dans le revers d’un nuage

d’après le morceau Ain’t no Sunshine de Sister Crayon

errance d’un mot

Sur fond de musiques absurdes, je me suis perdu dans les rues à la recherche d’un mot, je croyais l’avoir sur le bout de la langue mais en fait il était dans les airs, il s’enfuyait et se posait deci delà, sur les épices ou dans l’herbe ou au bord de l’eau, le fragile avait une prédilection pour les matières instables et vulgaires, invisible mais puissant à la fois, je me sentais comme en chantier suivant ce mot et les lignes de fuite sur ce mur blanc, je n’errais pas vraiment, j’étais là au hasard et j’avais une terrible envie de crier, de mettre à distance toute cette souffrance que je voyais au loin mais qui blessait le paysage.

d’après le blog paumée de Brigetoun, inspiré d’un billet Recycler errance d’un mot

froissement heureux au coeur du monde

J’avais rendez-vous avec sa musique, quand je passais le piano vibrait par delà les fenêtres, on aurait dit que les notes cherchaient à sortir, je m’arrêtais devant cet immeuble sans personnalité et j’écoutais, parfois j’arrivais à entendre tout un morceau et je repartais, d’autre fois je saisissais au vol un passage mais je ne pouvais m’attarder, je vivais régulièrement des moments magiques où les nuages, les passants, le mouvement des arbres, le bruit d’une voiture qui démarre, n’importe quoi, entraient en résonance avec la musique, alors je souriais à cette harmonie, ce froissement heureux au coeur de monde, tout commençait à prendre du sens et quand je partais la mélodie persistait longtemps et me quittait parfois juste au moment du sommeil, je me laissais griser par la promesse des sons.

d’après le billet N’importe quoi du blog paumée, divagations de Brigetoun

Feuille morte

J’ai perdu la tête. J’ai fui, j’ai marché, j’ai couru, j’ai frappé sur les arbres, je me suis perdu dans cette forêt. J’ai crié doucement en moi en regardant tomber cette feuille morte. Je ne veux pas vieillir. Je ne veux pas être seul. Je ne veux pas devenir fou. Et pourtant mes pensées s’échappent et flétrissent comme ces feuilles mortes. Et pourtant les mots s’emmêlent dans ma bouche et à force de chercher à les rassembler, j’en perds tout mon souffle. J’ai peur et je voudrais être plus que le reflet de moi-même. Aurais-je droit à un printemps comme ces arbres qui m’entourent et me protègent?

d’après le photoblog de Luc Lombarda , inspiré de la photo Feuille morte – Arboretum de la vallée aux Loups