Glacé

Je n’attends plus rien, je me sens libre, si libre devant cette immensité, ce froid apaise toutes mes angoisses, enfin je regarde le présent avec calme, une joie paisible gagne avec une vitesse inattendue tout mon corps, si chaque pore de ma peau a froid, en revanche chaque cellule intérieure est bien au chaud dans un sentiment de quiétude, je me sens flotter dans un doux état de léthargie, je n’ai pas envie de dormir mais juste de me laisser aller, de ne plus penser à rien d’autre qu’à regarder cette étendue glacée, cet espace enfin accueillant

d’après le photoblog 10mmgalore, inspiré de la photo Frozen

Ce flou sourit

La pénombre installe un calme dans mon coeur et dans le noir, je serais définitivement en paix. Je cherche désespérément une fin dans tous ces possibles quand le nuage reste silencieux. Il y a trop d’incertitudes dans ce courant d’air. Les pas ont laissé une frêle trace. Un rien d’horizon, ce flou sourit et je l’embrasse.

Regard enchainé

Je ne parvenais plus à rêver, ma tête vide promenait ses yeux dans un monde grisâtre, quelques visages qui passent ne rassure pas ma peur de solitude, je voudrais pouvoir oublier cette lumière, ce halo aveuglant qui m’empêche de revenir en arrière, la réalité n’était même pas insupportable, je ne sentais aucune culpabilité, simplement j’aurais tant aimé comprendre cet enchaînement qui enfermait définitivement mes pensées au point d’être pire que toutes les obsessions

d’après le photoblog caffeine+, inspiré de la photo Street Motion, Sapporo, Hokkaido, Japan, 2010

Lumière!

Je me suis évanoui ici, la musique des pas m’a éblouie d’un tempo trop lancinant pour mes pensées en désordre, des souffles inquiets et des percussions trop envahissantes sur ces murs froids, l’escalier vacillant m’a soudain bousculé et j’ai tenté de ne pas tomber, de lutter contre cette fatigue insidieusement permanente qui reprend le dessus, de m’accrocher aux silhouettes un peu flou qui sont devenu, avec brusquerie, silencieuses, et puis cette chute insensée vers le sol.

d’après le photoblog Caffeine+, inspiré de la photo Silhouette Sapporo, Hokkaido, Japan

Ma ville est vide

Ma ville est vide, ce n’est pas une explosion nucléaire ou autres catastrophes, ce n’est pas un jour férié, ce n’est pas l’heure creuse où tout s’absente sans qu’on ne sache pourquoi, ce n’est pas une évacuation préventive face à une intempérie majeure, ce n’est pas un montage, c’est mon crime qui m’enlève toute vie intérieure, la culpabilité efface toute présence humaine, une paranoïa poussé tellement loin que même mes yeux se jouent de moi, ce vide insensé visant à vouloir me faire basculer dans la folie alors que c’est aux autres de disparaître, ce serait si bon d’être le seul homme en vie avec tout à moi, pour moi et à cause de moi, devenir le maître du monde pouvant faire cesser tous ces sons absurdes qui ne font rien que contredire ce que je vois et ce que je veux, non, non, non, je ne peux pas penser sans le silence absolu.

d’après les photos de Matt Logue, inspiré de la photo Untitled #46 de la série Empty L.A.

Paysage en miette

Ma vie part en miettes, mes points d’ancrage se sont effrités et je suis devenu aveugle, ébloui par tant de violence alentour, tous ces mots acérés comme des rochers, je voudrais errer, prendre le temps d’apprécier le bleu si pur, écouter le calme du lac, appuyer sur pause dans ce diaporama blessant, la fin de notre amour, toutes les imperfections et les erreurs jaillissent du train train calme, sans compter les reproches claquant dans mon coeur pris par surprise et qui se serre, loin de tout comprendre, on dirait que les regards changent autour de soi et que tous approuvent la descente aux enfers… impossible de crier quand tout est parfait autour de vous

d’après les photos de Matt Logue, inspiré de la photo Mono Lake, CA

Plage en vie

Une pluie de mots bouscule mon corps plus sûrement que cet orage qui ne vient pas, trop immobile dans ma chaise, j’enrage d’être immobilisé, condamné à ne plus bouger, j’enrage d’être muet, condamné à ne plus parler, mais j’entends tout, vraiment tout, ce trop plein de sons, de phrases et d’infimes vibrations, me rend fou, alors j’aimerais me vaporiser en nuages noirs qui cribleraient les gens et les objets, tous si plein de vacuité, j’enrage de pouvoir, à peine, difficilement, poser mot après mot, ce qui transperce mon coeur, laissant mon corps perdu dans ces sensations et si avide de comprendre.

d’après le photoblog de Matt Logue, inspiré de la photo El Segundo, CA

Somme d’oublis

Les mouvements sont trop infimes pour retrouver le fil de ces rêves, j’ai tout oublié y compris où je suis, la fatigue me pèse tant et tant que je ne cherche plus à me lever, j’ajoute heure après heure du flou dans ma tête, joyeuses amnésies vers cette évanescence qui me rend un semblant de paix,

parfois j’ai la douce sensation de disparaître, léger comme un souffle de couette

d’après les photos de Claire Sloan, inspiré de la série sleep for days

Dans un fauteil

Est-ce que ma vie n’a tenu qu’à un fauteuil? Je me déformais à petits feux dans le mien tout en rêvant à celui du grand patron, fantasme d’un siège solide où l’éternité vennait à toi sans aucun effort à faire,
quand la vie s’enfuyait de mon corps, j’étais venu laminer mon bureau puis mon étage, puis… je déchirais des petits morceaux de papier peint, je cassais ce que ma force me permettait, mon couteau faisait des merveilles, un cadeau de maman,
quand la fatigue était trop forte, je regardais la décrépitude envahir l’immeuble et j’attendais l’affection opportuniste pour enfin me délivrer de tout ce qui me ronge, pire encore que la maladie

d’après la série « The Ruins of Detroit » de Yves Marchand&Romain Meffre, inspiré de la photo Donovan Building.

Jeux graves

Nos jeux et nos folies s’entrechoquaient sans penser à demain jusqu’à ce que la ruine affecte peu à peu nos lieux de luxure laissant pantois ces objets si rassurants, notre vie belle, et nos corps trop légers dans les gravats s’évanouissaient tout doucement dans la lumière… parfois par beau temps il nous est permis de repasser quelques secondes, dans le rayon de lumière, damnation éternelle de voir la décrépitude inexorablement gangréner notre passé.

d’après la série « The Ruins of Detroit » de Yves Marchand&Romain Meffre, inspiré de la photo Ballroom, Fort Wayne Hotel